Chaque printemps, le temps des sucres est toujours le bienvenu au calendrier de l'acériculteur et du friand des produits de l'érable. D'une durée d'environ un mois, cette activité saisonnière s'inscrit dans la période du carême, marquée par le jeûne et la privation. Un dicton affirme d'ailleurs que Pâques commence quand finit le temps des sucres! La saison des sucres s'accompagne de réjouissances et la cabane à sucre est souvent le théâtre de rencontres, de fréquentations et de jeux. Aujourd'hui, les nouvelles techniques de conservation des produits de l'érable prolongent cette saison pendant près de trois mois, soit du début mars à la fin mai. Une multitude d'activités sont organisées autour de cette production devenue industrielle et commerciale. Encore de nos jours, les campagnes sont parsemées de cabanes à sucre familiales héritées de génération en génération. Dans les grandes régions acéricoles, le paysage offre davantage de cabanes adaptées pouvant accueillir plusieurs centaines de personnes. Transformés en salle de réception, restaurants ou salle de spectacle, ces lieux sont maintenant ouverts toute l'année mais conservent toujours un cachet particulier tout en étant plus accessibles à l'ensemble de la population.
D'une année à l'autre, le sucrier adapte ses activités en fonction de la température, facteur déterminant pour la production. En fait, l'eau d'érable provient de la sève des branches qui gèle lors des nuits froides d'avril. Lorsque la température augmente le jour, cette sève redevient liquide et descend vers les entailles placées sur le tronc au bas des branches. Afin que la sève coule abondamment, le thermomètre doit descendre près du point de congélation la nuit et remonter le jour, sans toutefois que la neige ne fonde trop rapidement ou que la pluie ne découvre trop vite le pied des érables entaillés. Il existe une centaine d'espèces d'érables dans le monde entier dont plusieurs en Chine et au Canada, mais seulement trois espèces fournissent une sève de bonne qualité et en quantité suffisante. Il s'agit de l'érable à sucre (acer saccharum), de l'érable rouge (acer rubrum) et de l'érable argenté (acer saccharinum) aussi appelés «plaine rouge» et «plaine blanche». La sève de l'érable à sucre a une plus forte teneur en sucre que les deux autres espèces, ce qui donne un produit dont la qualité et la saveur sont supérieures. De plus, l'érable à sucre peut vivre jusqu'à 250 ans, soit de 100 à 125 années de plus que l'érable rouge et l'érable argenté (Dorion, 1997 : 85). C'est pourquoi cette espèce est généralement dominant dans le paysage des érablières québécoises.