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De coutume en culture

Le bouilli canadien

On conservait la viande de porc autrefois dans des barils de saumure pendant les mois d'hiver. Pour consommer cette viande, il fallait la dessaler en la faisant tremper dans l'eau, puis la faire cuire dans une deuxième eau avec les légumes du moment. Le bouilli canadien est un mets préparé en grosse quantité pour nourrir les grandes familles. Dans un immense chaudron, les légumes qui composent ce bouilli sont plongés entiers ou grossièrement coupés dans un bouillon salé par de gros morceaux de lard. On commence par faire cuire le porc environ deux heures dans une bonne quantité d'eau pour ensuite y ajouter les légumes par couches successives en commençant par les plus longs à cuire, soit le navet et les carottes. Le chou est généralement le légume le plus convoité du bouilli. On le couvre de haricots et de petites pommes de terre fraîches et l'ensemble doit encore mijoter une heure. Au début de l'automne, on chapeaute parfois le tout d'épis de maïs. De nos jours, la composition du bouilli varie selon les familles et plusieurs l'apprêtent avec de la viande de b?uf cuite avec ou sans carré de lard salé. Certains laissent fondre des morceaux de beurre sur les légumes qu'on a retirés du bouillon, et d'autres trempent leur pain dans ce même bouillon salé où ont cuit les légumes et la viande. Quelle que soit la recette, le bouilli canadien est un mets saisonnier associé aux légumes frais du potager. Encore aujourd'hui, il est un repas de fête où l'on invite bien des convives.

Le pâté à la viande

Le mot pâté est dérivé du terme pâte et il est attesté dès la fin du XIIe siècle. Chaque pâté est constitué d'une abaisse au fond puis d'un couvercle sur le dessus préparés en pâte feuilletée et il renferme des viandes et du poisson. Généralement, le pâté à la viande ou au saumon est cuit au four et servi chaud. À partir du XVIe siècle, le terme pâté désigne aussi une charcuterie enveloppée d'une croûte ou bien une viande hachée cuite dans une terrine qui se mange froid et tartinée en hors-d'?uvre. Cependant, ce type de charcuterie plus particulier à l'Europe est assez récent au Québec, mis à part les cretons qui sont de la même famille.

Dans la tradition culinaire québécoise, le pâté à la viande occupe une place importante. Selon les régions, il change de nom et sa composition varie pour chaque famille. Ce mets populaire est habituellement préparé avec de la viande de porc haché. Pour varier, on peut mélanger le porc avec du veau ou du boeuf haché afin que le tout soit moins gras. D'abord cuite au feu, la viande est assaisonnée d'épices et certains ajoutent de l'oignon haché en abondance, mais cet ingrédient est facultatif. Ensuite la viande est placée entre deux abaisses puis cette «tarte» est cuite au four. On apprécie le pâté à la viande accompagné de marinades et de ketchup aux fruits maison. C'est plus spécialement pendant l'Avent, au début de décembre, et après avoir fait boucherie que la maîtresse de maison prépare une série de pâtés que les membres de la famille dégusteront pendant le temps des fêtes. Le terme tourtière désigne à la fois le pâté à la viande et un autre type de pâté, le cipaille. De l'anglais sea pie, le cipaille et ses variantes six-pâtes, cipâte et cipare est un mets formé de cinq rangs de viandes séparées les unes les autres par six abaisses de pâte. Selon les régions (Saguenay, Gaspésie, Beauce, etc.), ce plat se compose de pommes de terre en cubes, de viande de porc, de boeuf ou de veau, de poulet ou de dinde ainsi que de gibier. Ce pâté étagé est surtout préparé pendant le temps des fêtes car il demande une grande quantité de viande. Dans les milieux maritimes, en Acadie par exemple, il existe un pâté équivalent fait avec du poisson que l'on appelle pâté de la mer.

Produits de l'érable et mets de cabane à sucre

Des côtes levées aux fèves au lard en passant par les saucisses de porc et le jambon, les mets qui mijotent dans le sirop d'érable sont variés et copieux. Nombreux sont ceux qui attendent avec impatience l'arrivée du temps des sucres pour leur visite annuelle à l'érablière. Non seulement ils y dégustent un repas chaud et sucré, mais ils y trouvent aussi une variété exceptionnelle de produits de l'érable et leurs dérivés, aux présentations toujours renouvelées et alléchantes. Cette production acéricole occupe d'ailleurs une part importante dans l'industrie agroalimentaire et touristique du Québec. Dans certaines régions, la saison des sucres se prépare durant toute l'année. Des mets sont présentés à des concours, des livres de recettes sont publiés, une nouvelle gastronomie à base de sève ou de sirop d'érable s'élabore et on trouve même des fines boissons alcoolisées. 

Voici quelques produits de l'érable et la façon de les apprêter.

Beurre d'érable : sucre d'érable mou. Son degré de cuisson est le même que la tire. Le liquide chaud, refroidi sur la neige doit être brassé longtemps pour atteindre sa consistance.

Crêpes dans le sirop : crêpes sautées dans la poêle et arrosées de sirop d'érable. Le sirop peut aussi entrer dans la préparation de la pâte à crêpes.

Fèves au lard : fèves au lard cuites dans un bouillon au sirop, arrosées de sirop d'érable frais en remplacement de la mélasse.

Grands-pères au sirop : pâte à crêpe cuite dans le sirop d'érable bouillant.

Grillades de lard salé : tranche de viande de porc très mince, avec la couenne, grillée dans la poêle jusqu'à ce qu'elle devienne croustillante. Appelées couramment «oreilles de crisse».

Jambon fumé : jambon suspendu aux poutres de la cabane et fumé par la vapeur sucrée et la fumée qui s'échappe du foyer.

Oeufs dans le sirop : oeufs pochés dans le sirop d'érable brouillant.

Pain de sucre : bloc de sucre moulé dans un contenant ou un moule de bois ou de fer blanc. Ce terme sert aussi à désigner une colline ou un mont ayant la forme d'un cône. On nomme aussi «Pain de sucre» un cône de glace formé pendant l'hiver au pied d'une chute. Le «Pain de sucre» de la chute Montmorency près de Québec constitue une véritable attraction touristique.

Tire sur la neige : sirop d'érable chaud et épais que l'on verse sur la neige où il fige avant d'être dégusté avec une palette (petite spatule de bois fabriquée à la cabane).

Trempette : pain trempé dans la sève bouillante et mangé comme un dessert. L'expression «faire trempette» signifie quant à elle : saucer une palette de bois dans le réduit pour ensuite la lécher.

(Extrait de Jean-Claude Dupont, 1975 : 84-101).

Le pâté chinois

Le pâté chinois se compose de trois ingrédients principaux : viande, maïs et pommes de terre. Les recettes varient d'une tradition familiale à l'autre mais son allure est généralement la même. Le produit fini est une sorte de pâté tricolore, sans abaisse ni croûte, formé en trois étages superposés. Au fond, un étage de viande, généralement du b?uf haché, au milieu un étage de maïs en grain ou en crème garni d'un étage supérieur de pommes de terre en purée. Attention : le pâté chinois est ordonné, au contraire des autres mets de même acabit comme les hachis, les bouillis et les bouillabaisses qui mêlent tous les ingrédients. Ce mets de tous les jours ne fait pas partie de la cuisine raffinée. Pour plusieurs familles, il s'agit d'un mets de dépannage souvent préparé à partir de restes de viande. Nutritif et simple à faire, il est l'un des préférés des enfants qui, après l'avoir sculpté de leur fourchette, le dégustent bien arrosé de ketchup rouge de fabrication commerciale. La popularité du pâté chinois au Québec en fait presque un mets national. Tout comme le ragoût de boulettes, la tourtière ou le pâté à la viande, il fait partie des stéréotypes qui décrivent les traditions culinaires québécoises. Une récente série télévisée d'humour à sketches, La Petite vie, en a même fait la marotte principale d'un des personnages : «Steak, blé d'Inde, patates !»

La tire Sainte-Catherine

Faite à partir de quelques ingrédients à la portée de tous, la tire Sainte-Catherine se compose de mélasse (importée des Antilles du temps de Marguerite Bourgeoys) ou de sucre brun ou blanc, d'eau, de beurre, d'un peu de vinaigre ou de bicarbonate de soude. Cuits en sirop jusqu'à la bonne consistance, ces ingrédients donneront une confiserie plutôt brune, blonde ou blanche. Après une étape essentielle «d'étirage» formant un long cordon, la tire est prête à être coupée en petites bouchées sucrées. Voici une recette typique de tire à la mélasse telle qu'on l'enseignait autrefois dans les cours d'économie domestique.

«Tire à la mélasse de 7e année»

Ingrédients :

1 tasse de cassonade 1/2 c. à table de beurre
1 tasse de mélasse 1 c. à table de vinaigre
1/4 tasse d'eau 1/4 c. à thé de soda à pâte (tamisé)

Mode de préparation :

2. Faire bouillir la cassonade, la mélasse, l'eau, le vinaigre et le beurre jusqu'à ce que la tire devienne dure en l'essayant par cuillère dans l'eau froide (boule avec queue)
3. Retirer du feu.
4. La laisser refroidir.
5. L'étirer et la couper en morceaux.

Recette du Cours d'économie domestique, 7e année, Ottawa, S?urs Grises de la Croix, 1956, tirée de Traditions et tire de la Sainte-Catherine, Centre franco-ontarien de folklore et CBON Radio-Canada, Sudbury, 1998, 20 pages.

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