Au Québec entre 1908 et 1913, c'est l'association professionnelle des employées de manufacture (APEM), une filiale de la Fédération nationale de la Société Saint-Jean-Baptiste, qui s'occupait d'organiser une fête du travail féminin en même temps que la fête du Travail qui avait lieu au début du mois de septembre.
D'après des témoignages oraux de femmes ayant fait partie du groupe Solidarité féminine, les premières célébrations du 8 mars eurent lieu dans les années 1934-35 à Montréal. Des femmes juives, tchécoslovaques, polonaises, et d'autres nationalités auraient invité les femmes francophones à fêter avec elles. À partir de 1937, les ménagères francophones commencèrent à se réunir entre elles pour fêter très simplement. La mobilisation était dans l'air car le 15 avril de la même année, 5000 ouvrières du textile firent la grève devant les petits ateliers de bas des rues Peel, Dorchester et Ontario, défiant ainsi la Loi du Cadenas. Vingt-cinq jours de grève qui mèneront, non sans peine, à la reconnaissance du syndicat et à l'octroi d'une semaine de 44 heures au lieu de 60 pour un salaire moyen de 16.00$, au lieu de 6.00$ à 12.50$. Cette première victoire débouchera en 1938 sur la Commission Turgeon, chargée de recueillir les plaintes des travailleuses de l'industrie du textile qui dénonçaient une longue litanie de mauvaises conditions de travail : ventilation inadéquate, poussière, malpropreté, humidité, chaleur, bruit, lieux sanitaires inappropriés, etc. En 1940, les Québécoises obtiennent le droit de vote. D'autre part, celles-ci sont fortement sollicitées à l'effort de guerre et cette période de mobilisation a sans doute contribué à ralentir la reconnaissance des revendications du travail des femmes.
En 1957, des femmes francophones se séparent du Congrès des femmes canadiennes et fondent la Ligue des femmes du Québec. À partir de ce moment, elles recommencent à célébrer le 8 mars avec les femmes d'autres nationalités. Jusqu'en 1973, la Ligue des femmes prit en charge l'organisation de la Journée internationale des femmes. Pour souligner le 50e anniversaire du 8 mars en 1960, une pièce de théâtre racontant les luttes des femmes à travers le monde est jouée. Les journaux et la télévision en parlent : premier signe tangible d'une reconnaissance publique. Puis, vers la fin des années 1960, tout se bouscule.
En 1971, le Front de Libération des femmes organise une campagne en faveur de l'avortement libre et gratuit. Le 8 mars est l'occasion de lancer la campagne au plan national. Autre événement qui fait la manchette en mars 1971 : Lise Balcer refuse de témoigner lors du procès de Paul Rose, un felquiste, en invoquant que si les femmes ne peuvent agir à titre de juré, elles ne devraient pas être appelées à témoigner lors d'un procès. Plusieurs femmes manifestent leur opposition aux dispositions législatives qui les excluent de la fonction de juré. Rappelons qu'à cette époque, seules les provinces de Québec et Terre-Neuve interdisaient aux femmes d'être jurées. À partir de cette date, les groupes de femmes, les syndicats et les groupes communautaires contribuent à faire du 8 mars une manifestation annuelle.
Créé en 1973, le Conseil du statut de la femme (la même année le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme est créé à Ottawa) s'avère d'un grand secours pour l'organisation d'une journée du 8 mars profitable aux femmes. Le conseil est d'ailleurs l'auteur d'un guide d'animation conçu pour venir en aide aux organisatrices. Le document tient compte des objectifs à atteindre, des participantes et des contraintes, et suggère des activités et des thématiques pour meubler la journée.
Le 8 mars 1974, la fête prend une certaine ampleur. Organisée par le comité de la condition féminine et des groupes de femmes, elle regroupe entre 2000 et 2500 personnes au sous-sol de l'Église St-Édouard autour de deux thèmes : un premier sur l'avortement et la contraception et un second, «ménagères, ouvrières, même combat». L'année 1975 est aussi marquée par l'effervescence. L'Organisation des Nations Unies avait même déclaré 1975 comme l'Année internationale de la femme. À Montréal, trois fêtes du 8 mars étaient organisées par diverses instances dont des marxistes-léninistes et des membres des trois centrales syndicales (CSN-FTQ-CEQ).
Le milieu des femmes était en train de s'organiser et on allait assister à la mise sur pied de plusieurs groupes féministes aux réalisations engagées comme la Librairie des femmes, le journal Les têtes de Pioche ou l'Agenda des femmes. En 1976, les Éditions du Remue-Ménage sont fondées et à l'occasion du 8 mars, on assiste au premier lancement de la publication de la pièce Moman travaille pas, a trop d'ouvrage présentée par le Théâtre des Cuisines. Cette pièce faisait suite à un premier spectacle de la troupe intitulé Nous aurons les enfants que nous voulons.
«À la fin des années 70, le 8 mars devient un jour de manifestation collective où les femmes de tous les milieux - groupes populaires, syndicats, milieux artistiques, gouvernement, universités -font le bilan des luttes, des progrès et des échecs du mouvement des femmes». (L'histoire de femmes, 1982 : 501). Depuis les années 1980, les Québécoises soulignent la Journée internationale des femmes par des célébrations qui s'échelonnent sur plusieurs jours, dans toutes les régions. Au fil des temps, les revendications ont changé mais les thèmes de réflexion dénotent des préoccupations communes de la condition féminine : garderies, double tâche, travail au foyer, syndicalisation, rapports hommes / femmes, santé, avortement, sexualité, contraception, sexisme, pornographie, violence, publicité sexiste, conditions de travail, présence des femmes dans les sphères politiques, religieuses, culturelles, etc., éducation des enfants et apprentissage des rôles comptent parmi les préoccupations toujours actuelles.
En 1992, le gouvernement canadien instituait le mois d'octobre comme le mois de l'histoire des femmes afin de sensibiliser davantage la population canadienne aux contributions des femmes à la société. Un autre pas vers la reconnaissance...