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De coutume en culture

Jusqu'à tout récemment, l'ensemble des traditions du Nouvel An est assez semblable dans toutes les familles, mis à part quelques variantes. À l'époque où la majorité des Québécois pratique la religion catholique, la journée du premier janvier commence au matin alors que toute la famille se prépare pour aller à la messe. Pour bien débuter l'année, il faut aussi communier le premier janvier puisque cela porte chance. Selon les familles, la bénédiction paternelle se fait avant de partir pour la messe ou au retour. Tous sont endimanchés et il est d'usage de porter un vêtement neuf pour le Nouvel An. Chacun doit étrenner un morceau de linge, que ce soit une robe, une cravate ou une paire de souliers car une croyance veut que celui qui n'étrenne pas ce jour-là risque d'avoir une maladie pendant l'année. Cette coutume va de pair avec celle de donner des étrennes.

Après le repas du midi, les visites de la parenté et du voisinage commencent. En certains endroits, seuls les hommes font cette tournée pour échanger les souhaits du Nouvel An. Ils passent par les maisons où leurs parents et amis les accueillent. Après les embrassades d'usage et les échanges de bons vœux, on arrose le tout d'un petit verre d'alcool et on déguste les biscuits et beignes de la maîtresse de maison. Les visites se passent ainsi tout l'après-midi jusqu'au souper où tous se réunissent à la maison paternelle pour le grand repas du jour de l'An. À une certaine époque au Québec, les familles étaient nombreuses et regroupaient plusieurs générations. Il n'était pas rare de trouver 50 à 60 invités et que le repas se déroule sur trois à quatre tablées. Préparé en partie depuis les boucheries du début de décembre, le menu se composait de soupe aux légumes, de tourtières, de ragoût de boulettes, de rôti de porc frais servi chaud ou froid, accompagné de patates jaunes ou de pommes de terre en purée. À cela s'ajoutent les betteraves et cornichons marinés ainsi que le ketchup aux fruits. Comme dessert, on trouvait quantité de gâteaux, de tartes, de biscuits et de beignes. Une fois que tout le monde avait mangé dans un va-et-vient continuel, la soirée se poursuivait par une veillée de danses ou de cartes. Ces retrouvailles duraient jusqu'aux petites heures du matin. En plusieurs endroits, les «soupers du jour de l'An» avaient lieu même après le premier janvier jusqu'à ce que tous se soient rencontrés, de la famille immédiate à la parenté élargie et éloignée.

Encore de nos jours, les souhaits du Nouvel An sont pratique courante dans les familles, mais aussi dans les milieux de travail. Dès minuit le 31 décembre, on fait le vœu que l'année qui commence soit bonne et heureuse. Pour certains, l'échange des vœux se fait selon une formule qui n'a pas beaucoup changé et qui dit avec plus ou moins de variantes selon les personnes à qui l'on s'adresse : «Bonne année, bonne santé, du succès dans tes études, du succès dans tes amours, et le paradis à la fin de tes jours!» Parfois, des souhaits ou des bons mots plus personnels s'ajoutent pour ceux et celles que l'on connaît bien. Quant aux visites du jour de l'An, elles s'échelonnent encore durant tout le mois de janvier et prennent plusieurs formes. L'essentiel des traditions du Nouvel An est conservé et c'est avec le même esprit de retrouvailles qu'on s'y adonne.

Les étrennes

L'usage de donner des étrennes le premier jour de l'année est très ancien et remonte au moins à l'Antiquité romaine. Cette coutume a cours dans plusieurs cultures qui célèbrent le début d'une saison ou d'une année.

Étrennes vient du latin Strenae ou Strena, mot qui désigne chez les Romains des cadeaux donnés à titre d'heureux présage, particulièrement aux calendes de janvier. L'étymologie est un monde complexe et certains auteurs affirment que le terme Strena dérive plutôt d'un mot sabin (de l'Italie centrale) qui signifie santé. Selon cette hypothèse, l'habitude de donner des rameaux sacrés dont l'espèce (olivier, laurier) présageait bonne augure remonterait au roi sabin Titus Tatius qui partagea le pouvoir de Romulus. Une confusion s'est aussi installée avec la déesse Strenia, une personnification de la santé, qui aurait présidé à l'échange de cadeaux lors des fêtes du solstice d'hiver dans l'Antiquité romaine. Quoi qu'il en soit, les étrennes ont été données le premier jour de l'année jusqu'au début du XXe siècle où la coutume fut déplacée au 25 décembre avec l'apparition du Père Noël.

Avant l'engouement pour la fête de Noël, les étrennes étaient donnés aux enfants le matin même du jour de l'An avant la messe et parfois au retour. Ces modestes cadeaux, le plus souvent pratiques, consistaient en un vêtement neuf, des fruits (pommes ou oranges), quelques bonbons et parfois des jouets pour les plus jeunes.

Chez les cultivateurs, certains donnaient une ration de nourriture plus substantielle aux animaux de la ferme le jour de l'An au matin, qu'ils appelaient «étrennes des animaux». Pour la plupart des enfants, c'était aussi au jour de l'An qu'ils recevaient un cadeau ou une enveloppe avec de l'argent de leur parrain et marraine, souvent seule occasion de rencontre de l'année. Aujourd'hui, nos réflexes de consommateurs sont stimulés par une surenchère de commercialisation des fêtes et la coutume des étrennes a quelque peu perdu son sens original de présage heureux pour l'année qui vient.

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