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De coutume en culture

«Avoir la bougeotte», vous connaissez l'expression? Elle signifie familièrement «manie de bouger» ou «habitude ou envie de se déplacer» (XIXe siècle). Au Québec, nous sommes quelques-uns à être atteints de cette manie. Voici des chiffres qui nous viennent principalement de deux sources: estimations faites à partir des branchements téléphoniques de la compagnie Bell ou des changements d'adresse de la clientèle chez Hydro-Québec pour la période du 1er juillet.

1973:  ~80 000 déménagements (Montréal seulement)

1988:  ~93 500 déménagements (Montréal seulement)
 ~160 000 déménagements (région métropolitaine)

1989:  ~107 000 déménagements (Ile de Montréal seulement)

1990:  ~29 000 déménagements (région de Québec)
~230 000 déménagements (tout le Québec)

1999:  ~275 000 déménagements (tout le Québec)
~700 000 (tout le Québec sur une année entière)

En 30 ans, le nombre de déménagements est allé en croissant. Il faut dire que ces données comprennent autant les déménagements des nouveaux propriétaires de maison ou de condominum que ceux des locataires.

Avoir la bougeotte peut-il être un trait culturel lié aux grands espaces que représente le territoire du Québec? En d'autres mots, les Québécois déménagent-ils plus souvent que d'autres? Y a-t-il un lien entre l'esprit qui anime le coureur des bois ou le voyageur des pays d'en haut si caractéristique aux Québécois et la pratique de déménager ou de rénover d'une année à l'autre?

D'un point de vue anthropologique, la mobilité des Québécois porte l'inscription sociale du nomadisme. Ce peuple est fait pour bouger à l'image du légendaire Jack Kirouac ou du François Paradis de Maria Chapdelaine  imaginé par l'écrivain Louis Hémon. Notre littérature regorge de ces personnages qui oscillent entre la ville et la campagne, entre le bois et la terre, personnages qui refusent en définitive l'enracinement. Du coureur des bois au voyageur, du gars de chantier au gars de la Baie-James, de l'ouvrier venu travailler en ville au colon qui a ouvert le Nord, en passant par le «coureur de factory», c'est moins l'instabilité qui caractérise ce comportement que l'ivresse de la liberté. Au fond, se déplacer fréquemment donne peut-être l'illusion de maîtriser l'espace et le temps ou encore, sa vie. Mais déménager n'est pas toujours un libre choix que l'on fait par plaisir ; pour certains c'est un compromis, un mal imposé, voire une nécessité. Quand le déplacement est imposé, déménager prend un tout autre sens.

Toutes les grandes villes, à toutes les époques, ont leurs quartiers reconnus pour avoir des logements plus ou moins convenables. Les gens qui y habitent déménagent souvent parce qu'ils manquent de confort, que les conditions de salubrité sont contestables ou que le coût du loyer est trop élevé. Évidemment, il n'est pas rare que certains locataires qui ne peuvent payer régulièrement leur loyer filent pendant la nuit à l'insu du propriétaire, parfois même avant le terme de leur bail. D'autres, installés dans le même logement depuis 25-30 ans, et dont le mot d'ordre est de ne pas parler au propriétaire des problèmes ou bris occasionnés par l'usure de crainte que la note des réparations leur soit refilée ou que le loyer soit rehaussé d'autant, préfèrent se suffire d'un logement aux modestes conditions. Rénover un logement, peut aussi être une façon détournée de chasser l'occupant pour ensuite hausser le prix du loyer en fonction des rénovations de manière à viser une clientèle plus en moyen. Au Québec, la Régie du logement est un organisme qui s'occupe des litiges entre propriétaires et locataires. Les principaux problèmes rencontrés ont trait à la résiliation de bail et au recouvrement des loyers.

On ne peut parler de déménagement sans aborder la question de la migration des gens déportés dans le but d'échapper à une réalité insoutenable ou catastrophique. Guerre civile, inondation, ouragan sont trop souvent la cause de déplacements forcés. Dans ces cas, migrer est une situation d'urgence imposée par le degré de gravité de l'événement et celui qui déménage dans ces conditions n'est jamais certain de retrouver son logis. Quant à celui qui immigre par choix mais dans le but de trouver une meilleure situation dans son pays d'adoption, il cherche à s'établir d'abord en ville pour augmenter les chances d'améliorer son sort. L'immigrant ne déménage que rarement à la campagne pour diverses raisons matérielles mais aussi parce que dans plusieurs pays, celle-ci est synonyme de pauvreté. Pour beaucoup d'immigrants, être pauvre en ville c'est déjà être plus riche.

Planifier son déménagement

Planifier un déménagement demande un peu d'organisation mais si cela représente pour vous une corvée, vous pouvez avoir recours à un conseiller. Agissant pour le compte d'un déménageur, cette personne possède une bonne connaissance des opérations concernant toutes les étapes d'un déménagement, du départ comme de l'arrivée. Le rôle du conseiller est d'inventorier, d'évaluer et d'estimer tous les accès, les étages, le contenu des pièces, la valeur des objets précieux ou fragiles, les emballages nécessaires (cartons, housses, couvertures, courroies, protections spéciales), il doit également noter et spécifier les difficultés d'accès, de passage, les précautions à prendre, etc. et fournir un devis détaillé accompagné d'une première estimation des coûts. Une entreprise de déménagement sérieuse dépêchera son conseiller sur place afin de voir à la bonne marche de l'exécution du déménagement. Sauf en période d'achalandage, le bon conseiller visitera votre demeure et vous conseillera pour votre nouvelle installation.

Si vous êtes plutôt de nature  indépendante, vous pouvez organiser votre déménagement vous-même à un moindre coût. Il s'agit de dresser un aide-mémoire qui vous aidera à planifier toutes les étapes d'un déménagement autonome et à prévenir les surprises et les oublis.

Avec ou sans aide, la corvée du déménagement s'accompagne de rituels dont la mise en scène varie selon que l'on est plus ou moins organisé. Voici quelques scénarios typiques :

Pour les plus organisés

Les déménagements, ils connaissent ! Ils n'en sont pas à leur premier et ils aiment surtout que les choses se passent rondement. Ils sont même un peu maniaque ! Chaque chose a sa place, son étiquette. L'emballage est longuement préparé d'avance et il n'y a pas de casse. Par contre, ils sont aussi parmi les premiers à terminer le nouvel aménagement et à pendre la crémaillère !

Plutôt du genre moitié-moitié ?

Ils ne sont pas traumatisés à l'idée de déménager et la préparation de cet événement ne les angoisse pas. Ils aiment par contre un minimum d'efficacité et apprécient se retrouver dans leurs boîtes. Ils savent que cette situation est temporaire. Ça ne les dérange pas de faire un peu de camping pendant un certain temps... mais ils aiment que les choses rentrent dans l'ordre dans un délai normal. L'essentiel est fait rapidement mais il leur reste toujours des boîtes qu'ils n'ont pas eu le temps de déballer.

De type brouillon...

Ils n'aiment pas prévoir trop à l'avance, faire des boîtes un mois avant la date du déménagement ou accumuler des cartons de chez l'épicier. Ils sont du genre déménageur autonome et font rarement appel à une entreprise spécialisée. C'est plutôt sur leurs amis qu'ils comptent le jour du déménagement. Avec eux, déménager est plutôt une partie de plaisir et ils accumulent les anecdotes et les incidents loufoques à cause de leur manque d'organisation. Par contre, ils payent toujours la pizza et la bière à la fin de la journée!

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